
Les Mères de la place de Mai (en espagnol : Asociación Madres de la Plaza de Mayo) - Argentine –
Le 24 mars 1976, la junte militaire menée par le général Videla renverse la présidente argentine Isabel Peron. Toute contestation est étouffée et pendant les sept années qui suivent quelques 30 000 personnes disparaissent enlevées par les forces armées. La junte restera en place jusqu'au 10 décembre 1983. Les militaires s'attaquèrent aux opposants civils : politiques, syndicalistes, prêtres et nonnes, ainsi qu'à leurs familles, leurs enfants, leurs amis, leurs voisins. Ils prétendaient défendre la grandeur de la « civilisation catholique occidentale » contre les « rouges » et les « juifs ». La plupart des victimes ont par la suite été «transférés », c’est-à-dire endormis, et jetés d’avion dans le Rio de La Plata.

Le 30 avril 1977, quatorze femmes se rendent sur la place de Mai, face au palais présidentiel, afin d’être reçues par Jorge Videla pour connaître le sort de leurs enfants. Elles sont bientôt quelques centaines, mères et grand-mères, qui tournent autour de la statue centrale, chaque jeudi à 15h30, jamais immobiles car les militaires interdisent de stationner sur la place.
Les Mères de la Place de mai rendaient fous les militaires en faisant des tours face au Palais présidentiel de la Casa Rosada pour exiger le retour de leurs enfants.

Elles demandent la réapparition « vivants de ceux qui ont disparu vivants. » Ces femmes que le pouvoir appelait les « folles » inventent une nouvelle manière de manifester et un nouveau mode de lutte populaire. Leur contestation joue un rôle clé dans la fin de la dictature, affaiblie par sa défaite face au Royaume-Uni après la guerre des Malouines.
Videla décèdera en prison le 17 mai 2013 à l'âge de 87 ans. Il avait été condamné à la prison à vie par un tribunal de Cordoba (centre) pour l'exécution d'opposants à son régime.
Aujourd’hui, les survivantes poursuivent encore leur combat. Les militaires ont admis que plus de 9 000 personnes enlevées ne sont toujours pas reconnues.
« Les Mères de la place de Mai » sont l’unique organisation de femmes en Argentine. Plusieurs des fondatrices avaient été assassinées à leur tour en décembre 1977. « Les marches de la Résistance » ne cessèrent qu'en 2006.

Si leur ferveur n’a jamais faibli, peu de temps après le retour à la démocratie, les « Mères » se sont scindées en plusieurs groupes. Les Grands-mères de la place de Mai continuent de rechercher leurs petits-enfants. De 1976 à 1983, des groupes armés ont enlevé des femmes enceintes et des enfants en bas âge avec leurs parents. Nombre de ces enfants ont été adoptés par des militaires ou des proches de la junte. Par la constitution d’un fichier ADN, les « Grands-mères » poursuivent leur quête.
En 1986, certaines « Mères » avec le retour de la démocratie créent alors « La ligue fondatrice » que l’on retrouve toujours lors des grandes affaires concernant des membres de la dictature. Un autre groupe a accepté les dédommagements versés à certaines familles par le gouvernement d’Alfonsín (200 000 dollars). Un débat a eu lieu sur l’acceptation ou non de cet argent.

L’association initiale s’est bien entendu maintenue autour d’Hebe de Bonafini, leur leader charismatique. Elle a déclaré en 2002 : « Nous n'acceptons aucune charge politique, mais nous faisons de la politique. Nous ne sommes pas un organisme des droits de l'homme ni une ONG, mais une organisation politique, sans parti. »
Les « Mères de la place de Mai » ont créé une Université populaire pour dispenser à tous, gratuitement, une formation politique et éthique commémorant le message des « 30 000 filles et fils » disparus. Elles ont ouvert une librairie et un café littéraire. Depuis 2005, elles ont une radio.

Les « Mères » ont des « filles » dans le monde entier, ayant inspiré d’autres mouvements.
La phrase «Nunca Mas», en référence au titre du rapport de la commission nationale sur la disparition des personnes (Conadep), est élaborée au lendemain du rétablissement de la démocratie, en 1983.
Elles ont effectué une véritable révolution dans le champs des droits de l’homme, en finissant avec les lois qui assuraient l’impunité aux tortionnaires, depuis 2007, impulsant de nouveaux procès, faisant le ménage dans l’armée, reconnaissant les droits de victimes, ouvrant toutes les archives de la dictature au public et rendant aux civils des lieux si symboliques comme l’ESMA (école militaire servant de base de torture).
« La seule lutte perdue est celle que l’on abandonne ». 1995 – Place de Mai.
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Hebe de Bonafini Pasteur (né Décembre 4 en 1928) est une militante argentine, l'une des fondatrices de l'Association des Mères de la Plaza de Mayo, une organisation des mères argentines dont les enfants ont été portés disparus pendant la guerre sale.
Née Pastor Hebe María à Ensenada, Province de Buenos Aires, sa mère était d'origine piémontaise et son père de la région espagnole de León; elle a été élevée dans la ville voisine de La Plata, et a fréquenté l'école jusqu’à la huitième année. En 1942, elle a épousé Humberto Alfredo Bonafini, d'origine lombarde, a travaillé comme couturière, et élevé trois enfants.
La sale guerre a coûté la vie de son fils aîné, Jorge Omar, le 8 Février 1977 de son autre fils, Raúl Alfredo, le 6 Décembre, et de sa belle-fille, María Elena Bugnone Cepeda, le 25 mai, 1978.
En tant que présidente de l'Association des mères depuis 1979, Bonafini a parlé dans la défense de son concept de droits de l'homme, à la fois en Argentine et à l'étranger, a obtenu une reconnaissance internationale; elle a reçu le Prix UNESCO de l'éducation pour la paix en 1999.
Adoptant le cri de ralliement de « Aparición con vida » (Les faire apparaître en vie) en 1980, Bonafini a exigé une comptabilité immédiate de tous les disparitions forcées, y compris ses fils. Au milieu d'un assouplissement progressif des restrictions, elle a organisé un Mars de la résistance le long de la Avenida de Mayo le 10 Décembre, 1982. Cet événement a marqué la première fois que le groupe marchait en dehors de l’homonyme Plaza de Mayo, et pour la première fois, il a été rejoint par de grandes foules de sympathisants.
Après le retour à un régime civil en 1983, les divisions ont commencé à se développer dans l'organisation relative à ce qu'ils croyaient être des progrès trop prudents du président Raúl Alfonsín en poursuivant les auteurs de la guerre sale. Alfonsín a créé en 1985 la première instance des Juntas; mais la décision de limiter la procédure à neuf membres de la junte militaire, ainsi que les acquittements prononcés à cinq de ceux-ci, a encore contrarié Bonafini. L'Association des mères est divisée, en 1986, en deux groupes d'environ 2 000 membres chacun: Bonafini de Mères de la Plaza de Mayo, et Association des Mères de la Plaza de Mayo - Fondation Line. Bonafini a généralement été identifiée avec la faction plus radicale, en choisissant de justifier les méthodes menées par la guérilla pendant la dernière dictature.