Léo Charles - La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis - Fête de l'Humanité
La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis
Débat avec Rémy Herrera, Frédéric Boccara, Léo Charles et Gaël de Santis.
Fête de l’Humanité 2019
Léo Charles
Léo Charles est maître de conférence en économie à l'université de Rennes 2. Ses travaux portent principalement sur l'histoire économique et en particulier les questions liées aux politiques commerciales (protectionnisme et libre échange). Il s'intéresse aussi aux méfaits du néolibéralisme sur les services publics et la fiscalité.
Léo Charles – Chine vs USA – Trump aime les bras de fer.
On a en face de nous un ancien négociateur en immobilier. Il adore négocier et il adore les bras de fer. Aujourd’hui, avec la Chine, sa stratégie est politique. Donald Trump fait des annonces de taxation. Il faut se souvenir de son slogan de campagne « Make America great again ! » (= rendre sa splendeur aux USA). Son analyse est assez triviale, simple. J’ai une deal commercial avec tel pays, je vais entamer un bras de fer pour rassure mon électorat de basse sur ma force. » L’Amérique est forte dans les négociations. Les premières annonces sur l’aluminium et l’acier ont été faites juste avant l’élection de mi-mandat qui concernait des régions des USA avec des ouvriers de ces industries-là.
Il faut montrer que l’Amérique revient sur le devant de la scène et ne se laisse pas dépasser par la Chine. Donald Trump utilise le Twit pour sa diplomatie. Il y a beaucoup d’annonces. On ne connaît pas les effets. Le qualificatif de protectionnisme me dérange car c’est avant tout une stratégie politique.
En 2018, la balance commerciale annonçait 475 milliards de déficit des USA vis-à-vis de la Chine. C’est pour cette raison que Donald Trump est parti en guerre. Ce déficit a explosé. On a mis des mesures protectionnistes. Mais le résultat attendu n’a pas été celui escompté par Trump. Les déséquilibres internes plus généraux perturbent la stratégie de bras-de-fer de Trump.
On peut discuter sur le terme de « guerre commerciale » car on en est encore assez loin. C’est un moyen pour les médias de dire : « Attention ! Le vilain Donald Trump et son protectionnisme ! ». Ca sert à défendre le libre échange. Ils montrent qu’il faut une ouverture des frontières.
(…) Donald Trump a bonne presse dans l’électorat moyen américain constitué d’ouvriers blancs.
Débat sur l’expression « guerre commerciale ».
Le libre échange c’est de la guerre. C’est un triple dumping écologique, social et fiscal. Ce n’est pas la guerre commerciale sous couvert de protectionnisme avec lequel on nous fait peur. Il n’y a pas un seul pays qui se soit développé sans utiliser de mesures protectionnistes. Le mythe de l’Angleterre libre échangiste au début du XIXe siècle n’est pas vrai. Ils étaient protectionnistes avec la prohibition. Dès que ça les a arrangés, ils sont devenus libres échangistes. On demande à tous les pays, notamment ceux du Sud, d’être membres de l’OMC. On veut nous faire croire que le libre échange, c’est la création de richesses, c’est le développement. Le protectionnisme de Trump est pour moi du mercantilisme.
L’économie selon Trump est focalisée sur la grandeur de la nation. « Il ne faut pas que je perde de l’argent et que j’achète trop à l’étranger. Il faut que je vende à l’étranger. » Sa politique sert clairement les intérêts du capital. Une politique protectionniste innovante développerait les infrastructures de l’éducation, de la santé. Elle remettrait au goût du jour les circuits courts, les salariés au cœur des entreprises. Ce n’est pas la vision du protectionnisme de Trump. Il n’y a qu’à voir le système de santé aux USA. Les infrastructures aux Etats-Unis sont en pleine dépression. Dans les médias, il y a derrière le mot « protectionnisme » la notion de nationalisme avec l’idée de « tout le monde reste chez soi en fermant les frontières ».
Je défends l’idée d’un protectionnisme qui soit altermondialiste, basé sur des relations négociées entre pays. L’erreur de Donald Trump c’est de faire ses bras-de-fer de façon unilatérale. Ca ne marchera jamais. On ne peut pas imposer son point de vue aux autres pays. Je crois en un protectionnisme qui soit écologique, social et qui soit une alternative au libre échange qui est une guerre contre les travailleurs, contre l’écologie, contre les états.
L’OMC est totalement bloquée aujourd’hui. Depuis 2003, le cycle de négociations n’avance pas. On négocie de façon bilatérale avec les Etats-Unis, avec le Canada. C’est un problème fondamental. On rentre forcément en guerre avec les autres quand on oublie tout multilatéralisme. Ce que l’Union Européenne devrait et pourrait relancer l’OMC, non pour négocier le libre échange, mais pour négocier un autre commerce alternatif. Ou alors encore mieux, on peut négocier avec l’ONU et redorer son blason. En mettant tous les pays autour de la table, elle pourrait dire : « On a imposé pendant des années le libre échange. Maintenant, on va négocier des protections. On va faire en sorte que chaque pays développe ses propres infrastructures, son propre modèle social, écologique, etc. Au lieu de se faire la guerre au nom du libre échange, on va coopérer ». Les USA attendent que l’OMC explose comme cela, ils pourront faire ce qu’ils veulent.
Est-ce qu’on veut un monde avec des chômeurs qui consomment des biens et des services pas chers ou un monde avec des travailleurs qui achètent des biens et des services au juste prix ? C’est la réponse entre libre échange et commerce alternatif.
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